L’assouplissement des modalités d’accès et de prise en charge des actes de téléconsultation, une fausse bonne idée ?
La pandémie Covid-19 a engendré de multiples bouleversements dans les pratiques médicales. Elle a entre autres révolutionné le recours à la téléconsultation, devenue en quelques semaines la réponse à un enjeu de santé publique. Les aménagements réglementaires déployés pour annihiler cette crise doivent-ils perdurer ? Décryptage de Stéphanie Hervier, Directrice Générale de Medaviz.
3 questions à Stéphanie Hervier, Directrice générale de Medaviz
1. Quel est le cadre légal de cet assouplissement ?
L’avenant 6 à la convention médicale, entré en vigueur en septembre 2018, a entériné la prise en charge des actes de téléconsultation dans le cadre du parcours de soins sur les mêmes modalités que les actes en présentiel.
Au premier pic de la crise sanitaire, Jérôme Salomon, Directeur Général de la Santé, annonce l’assouplissement des règles de prise en charge de la téléconsultation. Un décret adopté courant mars 2020 introduit ainsi une prise en charge à 100% des téléconsultations dans le cadre du parcours de soins et des téléconsultations hors parcours de soins si une personne est infectée par le Covid-19 ou susceptible de l’être.
2. Quels sont les bénéfices et les risques de ces aménagements ?
Ces ajustements, nécessaires pour préserver la santé et la sécurité des médecins comme des patients, ont encouragé la pratique de la télémédecine. Nous avons constaté une évolution sans précédent de la téléconsultation, avec 20 millions d’actes remboursés par l’Assurance Maladie en 2020 contre 60 000 en 2019.
Le large recours à la téléconsultation a permis aux médecins de suivre leurs patients sans contact direct, dans le respect des gestes barrière. La télémédecine a également permis aux patients d’éviter les contacts dans les salles d’attente des cabinets médicaux, sans que leur suivi médical ne soit interrompu.
Les risques sont liés à la lisibilité et l’interprétation de ces aménagements, pour les patients comme pour les professionnels : quels actes sont effectivement remboursés ? Pour quels motifs ? Pour quels patients ?
3. Faut-il privilégier un cadre plus contraignant, selon vous ?
Il est évident que la prise en charge à 100 % de la téléconsultation a été bénéfique pendant la crise sanitaire.
Pour Medaviz, il est cependant essentiel de revenir à l’application de l’avenant 6 dès lors que les conditions sanitaires le permettront. Nous sommes convaincus que la téléconsultation doit s’intégrer au parcours de soins coordonnés du patient pour être pertinente, ou dans le cadre d’une prise en charge territoriale.
Elle ne doit en aucun cas devenir une pratique médicale à part entière. Au-delà de l’enjeu du parcours de santé, se pose la question des déserts médicaux. En effet, si tous les médecins peuvent consulter à distance sans restriction, certaines régions faiblement dotées en praticiens risquent de se vider davantage. Elles risquent alors d’être privées de l’écosystème médical assurant le suivi des patients et de perdre en attractivité.
Directrice communication et affaires publiques & entraîneur sportif. Après un Master II en Géopolitique des enjeux frontaliers, Emilie oriente son parcours vers la communication institutionnelle et le marketing. Experte en stratégie et gestion de crises, elle rejoint Medaviz en 2019.