Partenaire Santé de La Solitaire du Figaro 2021, Medaviz a rencontré Alexis Loison, skipper du Beneteau 3 Région Normandie, qui détient le record de participations à la course mythique et prendra son 16ème départ le 22 août prochain.
Très vite attiré par La Solitaire du Figaro, parce qu’elle : “montrait des images de marins qui allaient au bout d’eux-mêmes”, il a participé à de nombreuses épreuves en solitaire, en double ou en équipage. Il revient sur l’expérience unique, acquise dans une course exigeante : “qui ne donne pas l’excuse de l’équipage ou celle du matériel, puisque nous avons tous le même bateau.”
Medaviz : Comment se prépare physiquement et mentalement, cette course où “naissent les légendes” ?
Alexis Loison : Les bateaux devenant de plus en plus durs à faire fonctionner, la préparation physique est indispensable. Elle est souvent faite avec les pôles d’entraînement. C’est toute une organisation, avec mon préparateur à Cherbourg, mon médecin, mon ostéopathe, mon kiné, qui sont autour de moi. On ne peut pas fonctionner sans. Je me suis déjà blessé en mer, donc j’accorde encore plus d’importance au fait de récupérer et de se rétablir au plus vite.
La préparation mentale est un autre aspect de la course. J’ai fait appel à plusieurs préparateurs depuis quelques années. Il y en a un qui m’a beaucoup marqué et lorsque j’ai fait une course en solitaire en début d’année, je l’ai contacté. J’avais l’impression d’avoir un bateau très bien réglé, d’avoir une bonne vitesse, de m’être bien entraîné physiquement et mes décisions n’étaient pas bonnes. Avec des mots choisis et des techniques, il appuie là où il faut, ce qui m’a aidé.
Medaviz : Comment la course a évolué depuis l’apparition des nouveaux bateaux et quels sont les nouveaux enjeux de sécurité ?
Alexis Loison : Pendant longtemps, j’ai navigué avec le même bateau et j’en avais un peu fait le tour, même si la dernière année on trouvait encore des améliorations. Il y a trois ans, il a fallu apprendre à se servir de ce nouveau bateau, à repartir d’une feuille blanche. Le mode d’emploi était à créer et on a pas fini de l’écrire ! C’est un bateau qui sollicite beaucoup, qui nous force à barrer. Et pour être un marin complet, je pense qu’il faut savoir barrer. C’est donc aussi ce qui me plaît beaucoup dans cette série.
Concernant la sécurité, les bateaux vont beaucoup plus vite, par contre, notre protection a évolué. Le casque nous protège des embruns, nous évite d’avoir les yeux brûlés par le sel. On a des masques de ski et de meilleurs cirés. C’est notre outil de travail. Il ne faut pas lésiner sur cet équipement, parce qu’un marin qui a froid, va moins barrer, va laisser le pilote automatique pour se mettre à l’abri et sera moins performant.
Medaviz : Quelles sont selon vous, les plus grandes qualités physiques et mentales d’un skipper ?
Alexis Loison : Pour le mental, c’est la ténacité, il faut toujours y croire. On peut se retrouver dans des situations incroyables et la ténacité a déjà permis des come-back impensables. Pour le physique, il ne faut pas être le plus musclé, il ne faut pas être celui qui résiste le mieux au manque de sommeil. Il faut être quelqu’un d’assez complet et savoir s’écouter. Cela vient aussi avec l’expérience. Au bout de 15 ans, on peut encore hésiter à aller dormir alors que c’est le bon moment, mais il y a un bateau à moins de 10 mètres et on ne veut pas le laisser. Et plus tard, quand on est fatigué, ce n’est plus le moment de dormir… Il faut savoir s’écouter et savoir se gérer.
Medaviz : Comment gérez-vous votre santé pendant la course ?
Alexis Loison : Il faut essayer de respecter une sorte de trame, ne pas oublier de repas et les prendre à des moments assez pertinents. Il faut faire attention à ses plats, prendre des choses que l’on aime et essayer de manger équilibré sur une journée type de 24 heures, sans trop d’apport de sucre, qui va créer un pic de glycémie pour nous faire retomber aussi vite et encore plus bas. Tout est lié, le mental, le physique, le sommeil, la nutrition. On s’aperçoit qu’il faut savoir tout gérer dans un même cycle, tout en faisant avancer le bateau le plus vite possible. C’est donc un sport assez complet en matière de gestion de soi. Dans une course à plusieurs étapes comme celle de La Solitaire du Figaro, celui qui va négliger sa récupération entre deux étapes, va consommer son capital énergie et finir à genoux.
En mer, on fait souvent de l’autodiagnostic en cas de problème, mais aucun d’entre nous n’est médecin. Tout se passe beaucoup à la VHF. Ce n’est pas forcément évident, la liaison n’est pas toujours bonne. On entend souvent un mot sur trois et faire un diagnostic est compliqué pour le médecin.
Medaviz : Quels conseils donneriez-vous aux bizuths ?
Alexis Loison : Cette année, j’ai un job un peu particulier parce que je coache mon futur remplaçant. Je trouve que la première participation est extrêmement dure pour un bizuth, mais ce n’est pas pour ça qu’il ne faut pas venir ! L’apprentissage que je fais avec Guillaume Pirouelle, qui a énormément de talent et qui est champion du monde de dériveur, doit l’aider à se lancer dans la course au large. Cette expérience m’a forcé à revenir aux bases, qu’il apprend avec moi et les jeunes apprennent vite !
Ce que je souhaite aux bizuths, c’est d’être comme moi, de toujours revenir et je sais que c’est arrivé à plus d’un. Les autres conseils : écouter les conseils. Il n’y a aucune raison pour que l’épreuve se passe mal. Quand on vient sur cette course là, c’est qu’on en a envie et quand on a l’envie, le reste suit.
Medaviz : Vous reviendrez sur La Solitaire du Figaro ?
Alexis Loison : Je n’ai pas prévu d’être au départ l’année prochaine, parce que j’ai envie de découvrir autre chose, sur d’autres séries. Je veux aller voir ce qui se passe ailleurs, toujours sur des monocoques et je reviendrai, parce que cette course n’a pas d’équivalence. Je compte sur ces prochaines expériences pour mieux revenir en Figaro, mais je compte aussi sur mes 15 ans de Figaro pour les appliquer sur d’autres bateaux.
crédit photo / La Solitaire du Figaro
Directrice communication et affaires publiques & entraîneur sportif. Après un Master II en Géopolitique des enjeux frontaliers, Emilie oriente son parcours vers la communication institutionnelle et le marketing. Experte en stratégie et gestion de crises, elle rejoint Medaviz en 2019.